Billie regarde son interlocutrice faire joujou avec sa petite mèche de cheveux lisse; elle, toutes ces filles au cheveu propret, parfaitement lisse et aux reflets contrôlés, Billie n'en était pas jalouse, pas du tout, elle se disait juste qu'elle n'était pas comme elles, avec son visage de rongeur et sa chevelure aussi pétillante et dérangée qu'elle. Elle se sait beaucoup de défauts, elle les assume pleinement et elle les transforme en qualités. Allez poser cette question à un passant ! "Salut ça te dirai d'avoir une colérique chronique, hystérique et complètement dérangée comme amie ?" Ça passe moyen avec les gens ... Simples. Athena aurait sûrement trouver un moyen de tourner autour du pot, renvoyer les questions et tout. Fascinant. Cette petite bavarde surprendra toujours Billie.
« Quoi de neuf, ma belle ? Réveil difficile ce matin ? »
Difficile était mot faible. Il était déjà presque 17h, elle venait à peine de se réveiller, a raté son rendez-vous, est complètement crevée. Elle en voulait à sa soeur, son frère. BANDES D'INCAPABLES. Elle plissa les yeux, son regard vogue une seconde sur le vide de la salle, calme. Elle repousse ses boucles désordonnées et sourit de nouveau.
« Je me suis réveillée y'a quoi ? Une petite heure, GRAND MAX. Et je suis crevée comme un pneu de mauvaise qualité. Je veux bouffer, je veux pouvoir ouvrir mes yeux ENTIÈREMENT ! »
Elle écarte ses yeux à l'aide de ses petits doigts trapus et tire la langue au vide. Elle se laisse tomber sur les fesses, soudain lasse, un peu triste, les cheveux en soleil autour de sa figure de fouine mal maquillée, elle étend ses jambes alors que la jupe en corolle vogue haut sur ses cuisses. Elle fait comme si. Comme si elle n'avait pas remarqué l'air perdu, pendant une fraction de seconde, de son amie. Pensant qu'elle lui expliquerai peut-être, si bon lui semble. Elle ferme les yeux et inspire profondément pendant que la brune se déplace pour s'asseoir.
« Je crois que j’ai fait fuir les gens, ils sont tous partis quand je suis arrivée dans la salle. »
Ça y'est ! Changement de conversation, naturel, Billie est habituée, complètement habituée. Avec la fatigue, son léger amusement explose, elle part dans un fou-rire mal contrôlé. Elle tourne son regard vers Athena et l'interroge des yeux. Elle penche la tête. Ce n’est même pas vraiment DRÔLE, PUTAIN. Une partie d’elle se baffe, se déteste, se morigène, se débat au fond de son crâne. Y'a un truc. C'est certain. Elle récupère son paquet de clope dans sa veste en jean et l’ouvre consciencieusement, presque assise ; elle tire sur la cigarette, la coince entre ses lèvres rouges, et l’allume avec son zippo. Elle aspire et recrache la fumée.
« Tu attends quelqu'un de particulier ? Tu PENSES à quelqu'un de particulier ? »
Derrière la nouvelle fumée, elle observe Athena, esquisse un sourire, bat des cils, un peu moqueuse, un peu attendrie, soudain submergée par un sentiment de maternité dingue, elle a une grande tendresse, une grande affection, une grande cajolerie pour Athena. Elle est si mignonne, l’adorable, la chérie, la douce ! Elle l'interroge de nouveau de son regard bleu, laisse sa cigarette se consummer, ramène ses jambes en tailleur.

- Tiens. C’est pas grand-chose, mais le chocolat c’est bon et ça remplis l’estomac !

- Non. Je pensais à Jess. Tu sais, mon meilleur ami. Je l’ai pas vu aujourd’hui, normalement je passe au moins une fois dans la journée au café où il travaille, parce que je connais ses horaires par cœur, tu vois, mais aujourd’hui j’ai pas pût, parce qu’en sortant de cours, y’a une espèce de harpie qui m’a attrapé le bras, la bouche en cœur et le regard suppliant, me demandant de lui expliquer le cours… Et puis tu me connais, je suis gentille, alors j’ai dit oui, parce que je pensais que ça irait vite, mais cette andouille a mis deux heures avant de comprendre, du coup, je ne suis pas allée voir Jess. Je pourrais bien y aller maintenant, mais à cette heure-là, y’a pas mal de monde et s’il me voit arriver, il va me dire de partir et moi, je vais m’asseoir au comptoir, et je vais commencer à parler et à lui raconter ma journée, et à l’empêcher de travailler, parce qu’il se sent obligé de m’écouter quand je parle, parce que de toute façon s’il ne m’écoute pas, je le bombarde de miettes de muffins jusqu’à ce qu’il m’écoute, et il va se mettre à grogner comme d’habitude en me disant que je suis pénible et qu’il ne sait pas comment il fait pour me supporter !

- Pardon, j’ai encore parlé trop, et trop vite, non ?

Athéna s'agite, elle nie, fait l'enfant qui se la joue "NON C'EST PAS MON NAMOUREUUX !" Billie rit, elle glousse, fourrage ses cheveux s'allonge et rit de plus belle. Agitée, la pupille innocente, encore un gloussement. Putain mais elle a quoi pour être aussi excitée ? Elle est en cloque ou quoi ?
Ou elle n'a pas assez dormi.
Elle se redresse, essuie son œil salement noirci, étouffe encore un gloussement. Elle rallume une clope en dévorant Athena du regard, ses lèvres carmines s'étirent de nouveau, elle toussote et regarde le nuage opaque se dissper. Athena semble tellement comédienne, tellement fausse ! Et pourtant, il y cette espèce de sincérité qui tue Billie. Ce petit regard vrai, cette voix imperturbable qui sonne parfaite. Billie la regard s'agiter, bouger, refuser. Oui, c'est exactement ça elle refuse.
« Non non non non ! »
Billie rit, euphorique, elle tire un taffe sur sa clope et regarde son amie, les yeux luisants, elle pense la laisser parler, se piéger elle-même. De toute façon si elle ne se fourre pas dedans elle-même, c'est Billie qui trouvera comment faire pour savoir si VRAIMENT elle ne le considère QUE comme son meilleur ami. C'est tellement facile, Athena parle tellement qu'elle trahit ses propres dires. Billie ne dit rien, laisse faire.
« Tu n’y es pas. Je ne fantasme pas sur Jess, et je ne suis pas amoureuse de lui ! C’est mon meilleur ami depuis plus de cinq ans, il me connaît par cœur, et inversement. On passe notre temps à se chamailler, et c’est un râleur. Il râle tout le temps, et même pire, il grogne ! Mais je n’imagine plus ma vie sans lui aujourd’hui… C’est vrai que je l’aime beaucoup, mais je ne suis pas amoureuse ! »
Gamine. Puérilité et stupidité, Athena n'est pas si différent de Billie pour le coup. C'est un râleur qui râle tout le temps ! Ça sonne tellement ... Innocent et sans arrière pensée. Billie n'arrive pas vraiment à comprendre pourquoi Athena se refuse à laisser ses sentiments prendre le dessus. Billie le fait, ça semble simple, subtil et , pourtant, très peu de personnes le font. Elle sourit, tire la langue et continue de se taire. Elle aspire la fumée, recrache le nuage. La cigarette est vicieuse.
« Je savais que tu allais me dire ça, en fait. Bizarrement, tout le monde me le dit. Mais je ne suis pas amoureuse, c’est vrai, je t’assure. C’est vrai que je critique souvent les filles avec qui Jess sors parfois, mais c’est parce qu’il mérite quelqu’un d’exceptionnel, tu vois ? Ca ne veut pas dire que je l’aime. Je sais même pas vraiment ce qu’est l’amour, je suis pas ce genre de fille romantique et tout ! »
Elle va changer de conversation. Billie compte. Trois. Deux. Un.
« Dis, t’as encore faim ? Parce que j’ai encore des barres de chocolat dans mon sac, je suis obligée de les emmener avec moi si je ne veux pas que ma colocataire les mange toutes pendant que je suis pas là. »
Billie lui fait signe de se taire. Bien sûr qu'elle a encore faim. Elle prend une dernière bouffée de fumée sur sa cigarette et l'écrase au sol. Elle regarde Athena, les yeux plissé, presque provocateurs, agaçant.
« Oh mais moi, je dis ça comme ça. Que tu t'étonnes pas d'un éventuel dérapage de ma part. Si je lui tombe dessus, je me souviendrai de ce que tu m'as dit; tu n'es pas amoureuse de lui. Et oui, je veux bien un autre barre de chocolat, t'es adorable. »
Idiote Billie, provocatrice. En vérité, elle se fiche complètement de Jess, elle ne pense pas qu'un jour elle se réveillera, dans son lit, ou inversement. Mais, elle avait dit ça pour chatouiller Athena, l'embêter, lui faire cracher le morceau, qu'elle s'énerve. Qu'elle explose même, si tel était son tempérament.
Le regard gouailleur, Billie fixe le vide, attend.

Chocolat. Elle mange la barre de chocolat adorable geste de la part de son amie. Elle la regarde gesticuler, elle observe tranquillement ses sautes d’humeurs adorables et ridicules, ses mouvements de surprise, ses câlineries éphémères et ses fureurs éclipses, elle ne peut pas s’empêcher de sourire et de s’attendrir. Billie se trouve un côté maternel. Billie. Maternelle. MATERNELLE. Comme si c’était son genre ! Quelque chose ne va pas ; elle s’en fiche, des mômes, elle, elle leur verse de la bière dans leur jus d’orange, elle leur offre leur première cigarette, et quand le moment est venu, elle dépucèle les innocents puceaux ! Elle n’est pas maternelle. C’est inadmissible. Elle tire la langue et lance une oeillade calîne à Athena qui se met à parler comme une fillette hésitante. Les yeux posés sur elle, le regard calme et tranquille, Billie l’écoute parler en enlaçant contre elle ses genoux frileux tout en avalant le dernier bout de chocolat qui fondait dans sa bouche. Elle obtient la réaction attendue, elle n'est pas du genre à faire ce genre de choses, même si elle est capable de presque tout, ça elle pense ne pas pouvoir, c'est contre ses principes. Alors elle enroule une mèche autour de son doigt.
« Mais tu… Je… De toute façon, tu n’es pas son genre et il n’est pas le tien. Et puis tu ne ferais pas ça hein ? Parce que… Enfin parce que quoi ! »
Billie ne peut s'empêcher d'étouffer un doux rire. Elle fiche sa main devant sa bouche et repose son regard, gouailleur cette fois-ci, sur la brune qui s'agite et fait la moue.
« Je ne suis pas amoureuse de lui, bordel de chenille ! »
Athena hausse un peu la voix ce qui a un effet contraire à celui voulu et qui fait rire Billie qui se demande si Athena elle-même se croyait et s'entendait. Peut-être qu'il fallait qu'elle enlève les bouchons dans ses oreilles, qu'elle coupe ses cheveux qu'elle agisse un peu. Parce que, si cette fille n'est pas amoureuse de son meilleur ami, Billie est une sainte. Billie est un amour. Billie n'est pas une coureuse et Billie ne passe pas ses nuits dans des bars. Elle fourrage ses cheveux -mais qu'est ce qu'elle a aujourd'hui avec ses cheveux ?- et elle sourit maigrement avant qu'Athena baisse les yeux au sol et se relance dans un mini discours.
« Tu ne le feras pas, hein ? Parce que… Parce qu’après, si ça finit mal entre vous, je vais être embêtée moi ! Il va te détester, ou tu vas le détester, et je vais me retrouver entre vous deux, et c’est pas bon ! »
Billie accepte l'excuse stupide, invraisemblable et secoue la tête de gauche à droite et va s'allonger sur le sol. Elle roule sur le sol, comme une idiote, et elle rit. Elle rit. Plus que la hyène. C'est une Fox, elle ne va pas laisser son amie se faire du mal. Se faire du mal, c'est la bonne expression. Chaque fois que son stupide meilleur ami va ramener une fille, elle va être complètement dégoutée, complètement abattue et sera d'accord avec elle même. D'accord avec ses stupides arguments, ses stupides "Pas assez bien pour lui". Billie se relève et attrape le menton d'Athena.
« Il faudra que tu me le présentes tout de même. Tu vas pas me laisser dans le doute et attendre que je le trouve par moi-même ? Je vais demander à tous les mecs que je croise s'ils s'appellent Jess ? »
Billie dépose un petit bisou sur le nez plissé de son amie et tourne sur elle même en reculant. Et elle se laisse tomber doucement sur le sol. Elle rit, les frisettes plus folles que jamais, les fossettes enfantines et les yeux brillants. Levant la tête vers son amie, elle lance un clin d'oeil à cette denière avant de se relever d'un bond. Puis viens se placer à côté de son amie.

Billie sourit légèrement, s'imagine un instant à demander à chaque mec "Eh, t'es pas Jess Spader dis moi ?". Bah. Jamais elle ferait un truc pareil ! Parfois, elle demande même de de nom. Alors là, elle passerait pour une hystérique, elle les ferait tous fuir et, c'est pas le but. Athena rit quand Billie la relâche et, comme si elle lisait dans ses pensées, elle dit :
« Pourquoi pas ? Ca serait marrant de te voir arrêter tous les types de la ville en leur demandant comment il s’appelle ! »
Billie rit, comme une gamine, s'étale par terre et tiens son ventre. À priori, la fatigue ne s'était pas estompée, vu comme elle était sujette à des états émotionnels extrême. Elle essuie ses yeux, essaye de rendre ses cheveux moins pailleux, esquisse un sourire attendrit et s'allonge en croix sur le sol.
Elle adore parler, mais, avec Athena, elle préfère laisser faire. La brune sait très bien se charger de la conversation, chose qu'elle fait souvent avec d'autres. Elle prend des vacances avec Athena, se tait et laisse les questions venir à elle. Elle sent une main froide fourrager dans sa tignasse soleil, plisse le nez et sourit. Elle se fiche pas mal qu'on la décoiffe, vu les cheveux qu'elle a, tant pis. Idiote, elle aplatit sa touffe dorée, comme si elle pouvait rendre ses cheveux moins fous et elle souffle sur ses mains. Regarde un peu ses ongles courts mais colorés. Ses petites mains de gamines. En vrai, elle ressemble à une gamine, si elle avait pas une taille correcte, un semblant de poitrine et qu'elle mettait pas des vêtements d'adultes, elle ressemblerait à une gamine hystérique. Un enfant blonde. Sans qu'elle n'eut le temps de crier gare, elle se retrouve avec le téléphone d'Athena sous le nez. Elle lâche un petit cri de singe et regarde ce qui lui est montré, saisit le téléphone et essaye de distinguer les personnes présentes sur la photo. Elle voit Athena, morte de rire et, un garçon, l'air un peu plus sérieux mais, avec un simulacre de sourire, une légère lueur d'attendrissement dans les yeux. C'est mignon.
« C’est lui. La photo est floue, désolée, c’est ma colocataire qui a pris la photo et … Enfin elle est pas très douée avec un appareil photo entre les mains ! »
Billie sourit. Il est mignon, il a un visage un peu trop figé à son goût. Mais soit, il est beau.
« Au moins je risque pas de rater mes 50 prochains coups, maintenant que je sais à quoi ressemble ton fameux Jess. Tu m'empêcheras pas de lui parler un jour, ça c'est sûr. »
Elle rend le téléphone, adresse un clin d'oeil et se rallonge. Ses mains sont froide, ses genoux frilleux. Elle sort un miroir de sa besace et remet un peu de rouge sur ses lèvres qui semblent sèches. Elle a horreur de faire des retouches maquillage comme ça mais, là, ça s'imposait. Elle regarde Athena, qui lui tend une nouvelle barre en l'interrogeant du regard. Elle va finir par grossir si Athena la gave comme ça ! Déjà qu'elle se trouve de grosses fesses. Elle ne peut cependant PAS refuser du chocolat. Elle regarde Athena avec déception mais se saisit de la barre et mord à pleines dents.
« Tu veux me gaver ? Merchi t'es trop. »
Elle avale et remord de plus belle.
« Assez parler de moi, comment tu vas toi ? »
Billie manque de s'étouffer. Comment ça va ? Comment ELLE va ? Elle réfléchit un instant, avale le morceau dans sa bouche et se lève en époussetant ses vêtements.
« Tu sais moi, ça va ça viens. »
Elle lui fait un clin d'oeil avant d'enchaîner.
« Mais, y'a un type qui m'intrigue un peu. Tu sais, la plupart des mecs ici me voient pas comme une fille. Enfin, pas comme une fille, tu me comprends ? J'ai pas l'étoffe d'une princesse aux cheveux lisses et aux yeux papillonnants, pas comme toi ou Talie ou même Naveen. Je ressemble plus à une pile électrique à crinière. J'suis pas une princesse, j'suis pas magnifique. Mais tu connais Alec ? Bah il m'a dit que j'étais magnifique. Tu me connais, les compliments, c'est le genre de trucs qu'on me dit quand on s'est bu 4 verres de vodka et qu'on s'apprête à rentrer. C'est une perche que j'attends toujours en général. Mais là, il était sobre. Chez moi. M'a regardée dans les yeux m'a complimentée. C'est bizarre. Très bizarre. Enfin, tu dois me trouver stupide de te parler de ce truc de gamine mais tu vois, c'est le genre de truc qui me choquent moi. Autant il m'aurait dit t'es bonne, t'es douée ou même que j'suis une trainée, j'aurai pris ça en rire. Mais là... »
Elle s'arrête. Qu'est ce qu'elle raconte ? Elle ? Elle aurait été prise au dépourvu par un compliment ? Elle fourrage sa tignasse et croise les bras. Peut-être Athena pourrait-elle comprendre ? C'est peu probable. Athena fait parti de toutes ces filles, qui semblent parfaites, innaccessibles, princesses. Billie, c'est LA fille facile par excellence. Elle est pas stupide, pas si vulgaire que ça, mais, elle assume d'être une fille facile à avoir.